Sur les routes de Strasbourg en compagnie de la team Action

Bienvenue à Strasbourg, à la frontière entre France et Allemagne.

Bien arrivées en terres Alsaciennes, notre Team ACTION a pu profiter d'un décor charmant et authentique pour les interviews de la semaine. Après avoir profité d'un week-end ensoleillé dans la belle ville de Strasbourg, nous avons ensuite repris la route, cette fois direction Annecy. Oui, nous avons été plutôt gâtées quant à nos destinations !

Sont passés devant notre caméra :

  • Etienne Courtois, co-fondateur d'ECOB, et Thomas Garcia, co-créateur de Moi, Moche et Bon.

  • Louis Zolt, jeune recrue chez Octop'Us.

  • Léa Jobert, fondatrice d'Isoria.

  • Jeane Clesse, podcasteuse de talent au travers de Basilic Podcast, à Annecy.

ECOB & Moi, Moche et Bon

ECOB c'est la création de deux frères, Etienne et Valentin. Il s'agit d'une gourde faîte à 75% de verre recyclé, et d'une housse en liège au design unique, et cousue à la main. Quant à Moi, Moche et Bon, c'est l'idée de donner une seconde chance aux fruits et légumes alsaciens dits "moches", en les transformant en jus. Par ce processus, non seulement on réduit le gaspillage alimentaire, mais on rémunère les producteurs pour l'intégralité de leur récolte.

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Etienne et Thomas ont été ouverts à nos questions, et nous avons beaucoup apprécié l'honnêteté de leurs réponses. Le fait qu'ils soient tout les deux jeunes entrepreneurs, mais que leurs opinions et expériences soient différentes d'autres comme GreenGo, est très enrichissant pour notre projet. Issu d'une école de commerce, Etienne nous a avoué avoir d'abord voulu se faire "un max de thunes" lorsqu'il est parti à New York. Mais c'est en voyant la réalité du système qu'il s'est finalement posé la question de son bonheur et de son impact. C'est de cette remise en question qu'est né ECOB, co-créé avec son frère designer : avoir un impact positif écologiquement, mais pouvoir en vivre. Car il souligne "on ne peut pas reposer indéfiniment sur des subventions". Thomas partage ce même sentiment d'avoir du sens, il s'imagine notamment à 70 ans, "un verre de cognac à la main, à table avec des amis" faisant un constat de sa carrière, et aimerait être fier du chemin qu'il a parcouru. Pour eux, monter leur start up c'était aussi une façon d'essayer de reprendre le contrôle face la vague tétanisante de la crise climatique et environnementale. Ils ne prétendent pas être des éco-citoyens modèles, ils essaient simplement de faire de leur mieux, et pourtant beaucoup attendent d'eux qu'ils soient irréprochables. On leur a notamment reproché de ne pas faire du Made in France, mais la réalité est que personne en France ne voulait les suivre dans leur projet, et que finalement l'Italie et le Portugal c'est aussi près, si ce n'est même plus près, que la Bretagne.

Il y a aussi cette course à la réussite dans le monde de l'entreprenariat, on occulte les loupés pour ne voir que les success stories. Thomas parle de son expérience Moi, Moche et Bon : "c'était chouette au début, puis c'est vite devenu trop stressant, trop de responsabilités à 23 ans, j'ai été jusqu'à m'en rendre malade." On leur demandait des business plan sur 5 ans, ce qui est simplement surréaliste. Le produit plaît, la demande est là, mais aucun fonds ne leur sont mis à disposition. En ressort alors une "déconnexion" forte entre entreprenariat, écologie & développement durable. Qui plus est, Etienne et Thomas dénoncent le rôle des banques qui sont "frilleuses" dès que les projets tendent vers un modèle éco-responsable : instaurer une consigne sur les ECOB, une idée qui bloquait les financements.

Ils déplorent aussi la trop grande importance de l'image, de la communication et du marketing qui se cache derrière cette "mode" éco-responsable. Les incubateurs sont à leur goût trop politiques, ils ne financent pas les risques, plutôt des investissements concrets tels que des machines pouvant être revendues en cas de problème, et ce même si les mastodontes de la grande distribution sont intéressés. Ils nous explique qu'il y a eu trop d'abus de greenwashing par des starts up, et que désormais on ne laisse plus le "droit de se planter", que l'on cherche les failles avant de voir le potentiel d'un projet. C'est en tout cas leur avis sur l'environnement Strasbourgeois, ils estiment que la situation est différente sur Paris.

De leur côté, Etienne et Thomas prônent plus de logique et de bon sens, plutôt que de l'écologie extrême pour faire avancer les choses. C'est encore une fois une histoire de communication, une sorte de dogme de l'éco-responsabilité qui les dérange. Ils s'entendent sur le fait qu'il est évidemment toujours mieux de tendre vers un idéal plus responsable, mais il ne faut pas oublier que l'on reste dans un modèle de société de consommation dans lequel le but premier est de vendre. De cette manière, l'idée écologique a été transformée pour devenir une problématique de personnes qui ont les moyens.

Quoi qu'il en soit, on apprend tout le temps en matière d'engagement, puisque tout évolue. Au fur et à mesure que l'information se démocratise, notre engagement peut changer de forme.

Octop’Us

Le lendemain de ce riche entretien avec Etienne et Thomas, nous sommes allées à la rencontre de Louis Zolt, qui nous a présenté Octop'Us, et fait visiter les locaux des Ateliers Eclairés.

Octop'us est engagée en faveur de la protection de l'environnement, plus particulièrement de l'Océan. Comme Blutopia, leur objectif est de lutter contre la pollution plastique, Blutopia en informant, Octop'Us en proposant des solutions low tech.

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L'ONG a élu domicile dans le tiers lieu des Ateliers Eclairés, tiers lieu un peu sorti de nulle part, au milieu d'un paysage industriel : grande entreprise bétonnée, port de commerce assorti de ses portes conteneurs, et de bâtiments industriels désaffectés. Chez les Ateliers Eclairés, tout est fabriqué sur place à partir de matériaux recyclés et revalorisés, l'artisanat et le fait maison sont une religion. La déco aux touches vintage, agrémentée de plantes suspendues, donne un véritable cachet à l'endroit. Le lieu est bien entretenu et très esthétique. Louis nous explique qu'il existe au sein de ce tiers lieu une forme de synergie entre les associations et entreprises présentes sur place. Un esprit de collaboration pour le meilleur se fait tout de suite ressentir. Dans le petit jardin, où un trampoline façon catamaran a été récréé, l'idée de se lancer dans un petit potager en permaculture est en réflexion dans des bacs. Les sols sont malheureusement trop pollués par les déchets présents dans le Rhin pour y faire pousser des plants comestibles. En attendant, les fleurs et plantes sauvages prennent vie aux abords du jardin, lui donnant un côté naturel et chaleureux indéniable.

Louis nous parle d'allier la technologie à l'écologie, de trouver la juste mesure entre progrès et obsolescence, afin d'avoir un impact concret et positif, tout en laissant place à l'expression artistique. Car pour lui, l'engagement personnel c'est bien, mais l'engagement commun c'est encore mieux pour avoir un véritable impact. Sa philosophie reste d’associer l’écologie à la facilité car cela devient vite chronophage, et l'on peut vite se faire submerger par le flot de nouvelles. Selon Louis, il faut apprendre à remettre en question ses certitudes, à aller au-delà des étiquettes et préjugés que l'on peut avoir. Il reconnaît la limite de l'être humain, et propose de simplement essayer de faire de son mieux à son échelle. Il nous parle d'un des projets d'Octop'Us, qui est d'utiliser des bouées faites de cheveux et de poils, récoltés auprès de salons de coiffure et de toilettage partenaires, pour dépolluer les surfaces marines. Cependant, des industriels et lobbys leur ont dit que le projet ne serait pas envisageable, cela n’allait pas dans leur intérêt. Ils voulaient au début dépolluer avec des cannes à sucre, mais elles sont bien moins efficaces que les cheveux et poils qui eux permettent de collecter l’hydrocarbures ou autres pollutions en milieu aquatique. Pari gagné, Octop’Us va prochainement installer ses bouées pour contrer des marées noires. L'ingénuité est de mise pour trouver des alternatives ! Le fin mot est donc d'être résilient, et de ne jamais baisser les bras. Louis rappelle la nécessité de faire appel à l'intelligence collective pour surmonter les obstacles qui peuvent parfois se dresser sur le chemin de notre engagement environnemental et responsable.


Isoria

Ce fut ensuite au tour de Léa Jobert, à l'initiative de la plateforme Isoria, de passer devant notre caméra.

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Isoria est né en Mars 2020, en période de confinement, moment propice à la réflexion et à la prise de recul sur nos routines et le monde en général. La plateforme regroupent des entreprises et des associations qui s'engagent à proposer des produits aussi bien respectueux de l'humain, que de l'environnement. C'est d'ailleurs l'idée de la Charte Isoria, de "proposer des produits respectueux de l’humain et de l’environnement en ce qu’ils considèrent le bien-être des personnes qui le fabriquent et en ce que leur production et leur distribution limitent, dans la mesure du possible et des connaissances actuelles, leur impact sur la pollution de l’air, des sols et de l’eau."

Depuis toute petite, Léa se sent engagée, et aussi loin qu'elle se souvienne, la préservation de l'environnement a toujours été au centre de ses préoccupations. En y réfléchissant, elle pense que la canicule de 2003, elle avait alors 9 ans, l'a particulièrement marquée : le jardin de ses grands parents autrefois si verdoyant et plein de vie, se retrouva jaunâtre, les plantes transformées en paille. Son oncle et sa tante sont aussi agriculteurs bio dans les Cévenne. Elle a donc grandi au plus près de la Nature.

Du côté professionnel, Léa nous a parlé de son stage de fin d'étude à France Nature Environnement, qui a été très formateur et lui a donné le goût d'agir, de s'investir pour défendre une cause qui lui est chère.

Avec Isoria, elle a voulu fournir une solution qu'elle n'arrivait pas à trouver ailleurs, qui permet de consommer autrement, en valorisant les emplois locaux, et en respectant la Nature. Dans le futur, Léa a pour ambition de concurrencer des plateformes comme Amazon et Alibaba, respectivement américaine et chinoise. Avec Isoria, elle proposerait une alternative européenne, éco-responsable et locale, qui revalorise aussi le travail. Le chemin qui lui reste à parcourir est long, mais l'idée est louable, et nous avons envie d'y croire. Qui plus est, avec Isoria elle allie les entreprises aux associations, créant une forme de plus value unique et inédite dans le domaine de l'ESS. Sa campagne de crowdfunding a atteint les 5 000€ en seulement 1 mois, et offrait des contreparties venant des entreprises faisant partie du réseau Isoria. Léa a pu alors complètement remanier son site Internet, et cela lui a fait réaliser que beaucoup soutenaient le projet. En revanche, comme Antoine, elle a été surprise par la rivalité qui peut parfois exister dans le monde de l'ESS, ce qui peut être un frein à l'avancement de projets. Pour elle, l'égo qui prend le pas sur le sens commun n'est pas lié au monde de l'ESS, c'est un domaine où on ne s'attend pas à y être confronté. Ce type de comportement apparaît en totale rupture avec notre génération qui est plutôt en quête de sens, et qui a compris l'importance de l'entraide, de la coopération au profit de la communauté.

Si Léa avait un conseil à donner aux jeunes se serait de ne pas baisser les bras même si l'on peut parfois se sentir accablé par la fatalité : "Qu'est ce que je peux faire? Je ne suis rien". Il faut donner du sens à sa démarche, rencontrer des personnes qui s'inscrivent aussi dans cette dynamique, et croire en ce que l'on fait. Il est trop tôt pour laisser tomber, le pouvoir est entre nos mains.

Basilic Podcast

Après ces belles rencontres à Strasbourg, il était déjà l'heure de sauter dans le prochain train. La Team ACTION a alors déposé ses valises pour un court séjour à Annecy. C'est dans ce décor de rêve aux airs de voyage, que nous avons eu la chance d'échanger autour de l'engagement avec Jeane Clesse de Basilic Podcast.

Le premier épisode de Basilic podcast a été diffusé en 2017, avec comme volonté de "rencontrer ces hommes et ces femmes qui, au quotidien, s’investissent dans des activités éco-responsables". Jeane est quelqu'un de très abordable, sympathique et chaleureuse. Connaissant l'ampleur de Basilic, nous étions un peu impressionnées à l'idée de la rencontrer. Elle a tout de suite su nous mettre à l'aise, et nous a félicité pour notre projet qu'elle trouve "très chouette" !

Jeane a été éveillée très tôt par ses parents aux questions environnementales. Manger bio, local, faire ses cosmétiques ou en acheter des bio, faire son compost, le ré-emploi... tout cela lui paraissait évident. En grandissant, elle s'est rendu compte que sa réalité n'était malheureusement pas celle de tout le monde. Elle a donc voulu faire connaître au grand public les initiatives de certains, des actions qui ont du sens et qui ont un impact positif sur l'environnement. C'est de là qu'est né son podcast "natif" (diffusé hors antenne radio) Basilic, alors qu'elle était à Hong Kong. Juriste en droit de l'environnement de formation, elle a souhaité éveillé les consciences aux différentes formes que peut prendre l'écologie, et montrer par sa diversité d'intervenants, que c'est un thème qui touche tous les domaines, que ce soit la finance, la mode, l'océan, l'entreprise, l'alimentation...

Jeane nous a confié avoir été frustrée lorsqu'elle est arrivée à Hong Kong : il existait un clivage entre sa sensation de bien-être, "d'être au bon endroit au bon moment", et la difficulté de garder une routine éco-responsable comme en France. Avec le temps, elle a réussi à surmonter cette frustration, et a même trouvé des alternatives pour être plus en accord avec ses valeurs écologiques. Elle a appris à être plus indulgente avec elle-même, et à faire de son mieux en fonction de la situation. Jeane estime important de déconstruire, et d'aller au delà, de l'image du militantisme écologique des années 70-80 qui était un peu trop extrême, et qui peut faire peur. Selon elle, il faut déculpabiliser tout en cherchant à approfondir ses connaissances sur le sujet de l'éco-responsabilité, questionner ses routines pour voir ce qui peut être amélioré. Il faut aller à son rythme, à son échelle de citoyen. Les Etats et grosses industries elles, vont aussi à un rythme différent, bien trop lent malheureusement. Et au final, ceux qui ont les plus gros budgets sont aussi les moins éthiques : Jeane évoque cela en parlant des marques qui la sollicite pour des pubs et placements de produits, ce facteur argent encore trop important. Il ne faut pas se jeter la pierre en tant que consommateur, simplement essayer de faire au mieux pour se sentir en accord avec soi-même. Etre bienveillant envers soi-même : l'écologie se vit aussi à l'intérieur de soi-même. C'est à ce moment là que Jeane nous a parlé de l'éco-anxiété, et de la solastalgie, deux maux qui touchent de plus en plus de personnes investies pour la préservation de la Nature. Mais elle insiste aussi sur le fait qu'il faut avoir les moyens d'agir, l'écologie est encore trop liée à une classe relativement aisée, c'est une thématique qui peut exclure des parties de la population dans la manière dont est abordée le sujet. C'est un privilège rien que d'avoir le temps de penser à la problématique environnementale. La seule chose aujourd'hui dans notre société, c'est qu'on ne peut plus dire qu'on ne savait pas. Jeane cite notamment SocialTer, Hugo Clément, ou encore Balance ta start up. Il y aussi eu l'explosion médiatique de la crise environnementale et climatique en 2015, avec la Cop21 à Paris. Aujourd'hui il faut oser poser des questions, ne pas avoir peur de se renseigner, car le seul frein c'est le savoir, mais le savoir se partage.

Poursuivre l'aventure

Après cette semaine strasbourgeoise et notre petit séjour à Annecy, nous aurons l'opportunité d'aller dans la belle ville de Lyon. Nous y rencontrerons la Fondation Good Planet, Time For The Planet, Julien Vidal avec Ça commence par Moi, et les Jeunes Ecologistes. Puis nous ferons un saut à Toulouse où nous discuterons avec Abeillons.

Pour nous suivre dans cette incroyable aventure, retrouvez-nous sur nos réseaux sociaux où nous réalisons quotidiennement des stories pour vous tenir au courant de nos étapes et de nos rencontres.

Nous vous retrouvons la semaine prochaine pour la fin de notre périple français dans un nouvel article !

Chloé & Emma, Team ACTION.